14-18 : nouvelles du front

Vu dans Libération de ce jour, un article intitulé "La Grande guerre expliquée aux CRS" : Nicolas Offenstadt, enseignant gréviste, organisait un cours sur la première guerre mondiale hors-les-murs. Mais ce cours avait lieu devant la tombe du soldat inconnu sous l'arc de Triomphe à Paris. Depuis plusieurs semaines, ces "cours sauvages" sont perturbés.
Sous l'Arc de Triomphe, il y avait les CRS pour empêcher une "manifestation" sur cet endroit solennel... (TéléSorbonne a filmé la scène!) Le cours aura finalement lieu plus loin et d'autres cours auront lieu ailleurs (voir le blog de la grève active de la Sorbonne)

Les collections numérisées de la BNF et de la BDIC nous permettent maintenant de consulter de très nombreux titres de journaux de tranchées :

La mise en ligne conjointe, par la BnF et par la BDIC, des gazettes de tranchées françaises ne concerne qu’une partie d’un ensemble plus vaste, mais dont elle est le cœur : les journaux rédigés et en partie réalisés sur le front lui-même, par les combattants pour leurs camarades. Cette mise à disposition du public sur Internet des journaux de tranchées français concerne actuellement près de 150 titres issus des deux établissements, pour 10 000 vues environ. A l’occasion de l’exposition « Orages de papier », cette entreprise s'est enrichie par la numérisation d’un volet en langue allemande issu des collections de la BNU, et offrira, à terme, plus de deux cents titres en ligne, de gazettes rédigées et diffusées sur les deux fronts, alliés et empires centraux. En attendant la réalisation d’un partenariat avec la Bibliothèque municipale de Lyon initié en 2008, et l’extension du programme de numérisation en direction des journaux de l’arrière et de prisonniers.

L'article "14-18, retrouver la controverse" paru sur La vie des Idées (Dossier sur la Grande Guerre) et dont je vous parlais le 20 janvier dernier relance le débat historiographique entre chercheurs.
La réponse d'Audoin-Rouzeau ne s'est pas fait attendre : Controverse ou polémique. En voici un extrait :
"En règle générale, je n’entre jamais dans les polémiques historiographiques. Je le fais cette fois-ci – très brièvement, que l’on se rassure – pour rappeler certaines évidences décidément trop obscurcies par l’article de François Buton, André Loez, Nicolas Mariot et Philippe Olivera, publié dans La Vie des Idées à la date du 10 décembre 2008.

Rappelons donc, en quelques mots, le bilan du travail effectué par les chercheurs – de plus en plus nombreux aujourd’hui, et aux origines nationales de plus en plus diversifiées – qui se sont agrégés progressivement autour de l’Historial de Péronne et de son centre de recherche. Il y a tout d’abord un musée, ouvert en 1992, à l’élaboration duquel les historiens stigmatisés par les auteurs de l’article paru le 10 décembre ont pris une part active, un musée dont la qualité est universellement reconnue. Il y a ensuite, en deux décennies, un renouvellement profond de l’historiographie de la Grande Guerre : élargissement de la perspective d’ensemble par le dépassement des clivages nationaux et la dimension comparative, multiplication des champs de recherche grâce à l’affirmation d’une histoire culturelle de la guerre qui a fait entrer dans l’historiographie de 1914-1918 des objets absolument nouveaux. "

-Verdun 30 000 jours plus tard / Photographies de Jacques Grison : Tel un archéologue, un sourcier, Jacques Grison part en quête de la mémoire vive de Verdun. Muni de son appareil photographique, 30 000 jours après la grande bataille qui rendit ce lieu mémorable, il guette les indices d'une histoire encore terriblement présente pour qui connaît comme lui, les mystères de ces terres de Meuse. Avec Philippe Claudel, il s'interroge : " Combioen de temps faut-il à la terre pour effacer la guerre ? ". Jacques Grison est un enfant du pays, petit-fils de deux anciens poilus.

-Orages de papier, les collections de guerre des bibliothèques : Entre 1914 et 1918, la guerre se lit, s'écrit, se dessine, se voit comme jamais auparavant.Ce déferlement médiatique a constitué un véritable "orage de papier" qui répond à "l'orage d'acier" des armes réelles. Batailles, victoires, défaites et vie au front y sont rapportées pour soutenir le moral des siens et affaiblir l'ennemi. Véritables armes de guerre, ces tracts, journaux, affiches, photographies sont très vite collectés. Rassemblés en "collections de guerre", ils témoignent de la grande variété des moyens mis en œuvre pouf l'emporter sur et hors du champ de bataille et nous font voir la guerre telle que la percevaient les contemporains.
Présentant de nombreuses illustrations inédites accompagnées de traductions en français des documents en langue allemande, cet ouvrage passionnant analyse le phénomène de vague médiatique des deux côtés du Rhin et conduit à la découverte d'une époque où médias, propagande et désir de victoire se confondent.

-1918 l'étrange défaite : archives du ministère de la guerre et témoignages inédits : Les auteurs se sont attachés à montrer, mois par mois, les perceptions du conflit, les espoirs pour un avenir meilleur, les mentalités de ceux qui font la guerre et de ceux qui la subissent. Une société entière s'adresse ici à nous au travers d'archives militaires exceptionnelles et inédites, provenant du service historique de la Défense, de témoignages privés et d'écrits d'artistes, de récits poignants d'adolescents, de notes de Foch et de Pétain, de journaux intimes racontant la vie des villages et des usines, de cartes d'état-major et de cartes postales.

-Dictionnaire de la Grande Guerre / Jean-Jacques Becker : Jean-Jacques Becker, spécialiste reconnu et incontesté de l'histoire de la Première Guerre mondiale, nous donne, à travers les articles de son Dictionnaire, autant d'éléments qui restituent tous les aspects de cette guerre : acteurs, positions des pays belligérants ou neutres, opérations militaires, transformations économiques, populations combattantes, civiles, ouvrières et paysannes, sans oublier les origines mêmes du conflit et les comportements intellectuels et mentaux des peuples.

-La première guerre / François Cochet : dans la collection idées reçues, ed° Cavalier bleu (Issues dela traditoin ou de l'air du temps, mêlant souvent vrai et faux, les idées reçues sont dans toutes les têtes. L'auteur les prend pour point de départ  et apporte un éclairage sur ce que l'on sait ou croit savoir). François Cochet est professeur d'histoire contemporaine à l'Université de Metz et l'auteur de plusieurs ouvrages de référence sur la Première Guerre mondiale.

Pour les questions particulières et parfois très pointues, le CRID 14-18 possède un forum sur lequel on peut faire des demandes, utile notamment pour les généalogistes.Ce n'est qu'une psite, d'autres forums existent plus localement, mais la connaissance du CRID, en particulier sur les témoignages de la Grande Guerre et sa réputation sont des garanties de fiabilité !

Si on parle du CRID, on se doit aussi d'évoquer l'Historial de la Grande Guerre de Peronne : à ce sujet, la Bibliothèque municipale de Lyon a invité en mars 2008 Stéphane Audoin-Rouzeau et Jean-Jacques Becker. Outre les aspects généraux et le "moment 14-18" la place des femmes dans la Grande Guerre a été évoquée. Cette conférence est en ligne sur le site de la bibliothèque.
Espérons que la venue de Rémy Cazals ne tardera pas...

Pas tout nouveau, mais à signaler tout de même, la mise en ligne par le Service Historique de la Défense des Journaux des Marches et Opérations rédigés pendant la première Guerre mondiale. La Revue Francaise de généalogie propose une visite guidée de ces archives en ligne :
Il s'agit en fait de registres où étaient consignés les événements vécus par chaque état-major et corps de troupe au cours de la campagne entreprise, sans commentaires ni appréciation personnelle.

D'autres en ont parlé avant moi :
- Centre généalogique de Maisons-Alfort
- Wikipédia (of course)
- Chemins de mémoire
- ...

Un ouvrage copieux sur un sujet peu abordé par les éditeurs : le service de santé aux armées, pendant la première guerre mondiale.

Présentation du livre par l'éditeur : Par l’ampleur de ses combats, sa durée inattendue, le conflit de 14-18 a fait peser de nouvelles et redoutables exigences sur le Service de santé aux armées. Quelques mois vont suffire aux équipes soignantes pour réorganiser entièrement, moderniser leurs moyens d’assistance et de secours auprès des combattants. De cette épreuve va naître l’un des meilleurs Services de santé des nations engagées.Le corps des médecins militaires, dans ces premiers mois de la Grande Guerre, va établir des principes d’intervention qui restent, aujourd’hui encore, valables.C’est l’histoire de cette adaptation des méthodes et des hommes, de la prise en compte d’un vaste champ d’intervention : médical, épidémiologique, chirurgical, psychiatrique, radiologique qui vous est proposée dans cet ouvrage.À travers les souffrances causées par la guerre, les traumatismes sous leurs formes les plus diverses, c’est aussi le courage et la compétence du personnel du Service de santé, qui sont mis en valeur.

A signaler aussi un article qui fait le point sur le bouquin, sur le site Clionautes :

Il n’est pas si fréquent qu’un "pavé" absorbe assez l’attention pour qu’on l’étudie presque d’une seule traite avec un intérêt soutenu. Dans le flux dense des publications qui accompagnent le 90e anniversaire de la Grande Guerre, entre vague commémorative et approfondissement historiographique, cet épais volume illustré avec soin éveille en effet un intérêt particulier, en raison du caractère relativement original et novateur de son propos. En double page au milieu du livre, un cliché du front représente deux brancardiers, l’un français et l’autre allemand, posant paisiblement côte à côte dans un trou d’obus à Verdun en 1916. Jetant un fragile pont d’humanité par dessus la cruauté des combats, l’image paradoxale et émouvante de ces sauveteurs de première ligne, unis par leur mission commune, cristallise à elle seule l’essence d’un propos que son évidence a peut-être banalisé jusqu’à l’ellipse : l’action vitale des soignants au milieu, et au service, des combattants.

Encore deux films cités :
- La chambre des officiers
- Les fragments d'Antonin

Retour au cinéma. La revue 14-18 propose un article "Les représentations de la Grande Guerre dans la production cinématographique européenne" par Céline Gauthier (chef du service communication au musée de l'Armée) et Laurent Veray (historien du cinéma)

La Première guerre mondiale, la première des guerres médiatisées. Tel fut le thème du premier opus cinématographique proposé par le musée del'Arméee en 2004, lors du 90e annivrsaire du début des hostilités. Cette année, l'établissement engage une réflexion élargie dans le temps et l'espace en s'interrogeant sur les représentations de la Première guerre mondiale dans la production européenne de l'époque jusquà nos jours, depuis les images documentaires et fictionnelles de l'événement jusquà celles qui en recomposent la mémoire, puis l'histoire.

Quelques films cités :
- La tranchée / William Boyd
- J'accuse / Abel Gance
- Les hommes oubliés / Alexandre Ryder
- Quatre de l'infanterie
- A l'ouest, rien de nouveau / Lewis Milestone
- Les sentiers de la gloire / Stanley Kubrick
...

Et des documents :
- L'héroïque cinématographe (DVD) / L. Veray et Agnès de Sacy, 2003
- Filmer la guerre, catalogue d'exposition de l'historial, 1995
- La Grande Guerre au cinéma / L. Veray, 2008

Je vous parlais de bande dessinée il y a quelques semaines, notamment lors de la parution de "Putain de guerre" par Jacques Tardi. Ce dernier sera à l'honneur à l'Historial de la grande guerre de Peronne, puisque l'année 2009 sera consacrée à la BD.

Présentation de l'Historial :
Après une année 2008 consacrée aux commémorations de 1918, 2009 sera dédiée à la bande dessinée. Nous aurons le plaisir de vous présenter une série d’expositions sur le sujet dont celle sur le parcours d’un des auteurs les plus emblématiques, Jacques Tardi. D’autres expositions, tables rondes, ateliers pédagogiques, spectacles, publications et signatures accueilleront des auteurs de choix et nourriront le sujet tout au long de l’année.
2009 verra également l’Historial de la Grande Guerre poursuivre la voie de la coopération internationale et mettre en valeur en avril la mémoire des soldats australiens qui ont combattu dans la Somme.

Deux expos à retenir :
- Tardi "Putain de guerre !" (14 mai-23 aout 2009) : L’oeuvre de Tardi explore largement la Première Guerre mondiale. Des bandes dessinées comme C’était la guerre des tranchées, Varlot soldat, ou Putain de guerre ! (1914-1915-1916) qui vient de paraître… apparaissent comme autant d’objets de médiation culturelle contribuant à la construction d’une mémoire iconographique plus ou moins objective de la Grande Guerre

- "Mobilisation générale !" : 14-18 dans la bande dessinée (18 sept-13 déc 2009) : Nombreux sont aujourd’hui les récits dessinés qui évoquent la Première Guerre mondiale et certains critiques vont même jusqu’à parler d’une nouvelle écriture BD de la guerre, voire d’un sujet à la mode. En ce sens, le neuvième art interroge l’historien : dans quelle mesure retrouve-t-on dans la bande dessinée les évolutions de la représentation de la « Grande Guerre » ? De quelle(s) manière(s) contribue-t-elle à faire de la Première Guerre mondiale le symbole d’une guerre moderne  ?

Le cinéma et l'histoire ont toujours été très liés : documentaires, images d'archives, fictions et depuis quelques temps le docu-fiction. Les parutions sur 14-18 ne dérogent pas à la règle puisque 3 livres sont actuellement en librairie :

- La Grande Guerre au cinéma, de la gloire à la mémoire : Laurent Véray, spécialiste du cinéma de 14-18, dans un livre richemetn illustré, retrace l'évolution de l'image de la Grande Guerre depuis les films héroïques et patriotiques, aux mises en scène de la violence extrême, les traumatismes psychiques. Contient des analyses de films (J'accuse, Les sentiers de la gloire, la grande illusion) et les remet en perspective au regard des récebnts travaux d'histoire culturelle.

- Une guerre qui n'en finit pas : La Première Guerre mondiale n'a cessé d'être présente dans la société française et, décennie après décennie, cette présence s'est même renforcée. Comment expliquer cet accès de mémoire, alors que le dernier des survivants s'est aujourd'hui éteint. En effet, si films et pièces de théâtre autour du premier conflit mondial ont existé depuis 1914, leur production est de plus en plus abondante. Ces divers types de représentations cherchent, selon les circonstances, à exalter les valeurs patriotiques ou, au contraire, à inspirer le dégoût de la guerre pour l'abolir à jamais. L'obsession de la commémoration de 14-18, c'est-à-dire le souci de transmettre les enseignements du passé aux jeunes générations, n'a jamais fléchi. La Grande Guerre, en France peut-être plus qu'ailleurs, n'a cessé de susciter des images, des films, du théâtre. Une nouvelle série de productions s'est même intensément développée ces dernières années. Comment transposer à l'écran ou sur scène les souffrances et les horreurs engendrées par le conflit ? Comment émerge le genre " film de guerre " ? Existe-t-il des spécificités nationales ? Que disent les films et les pièces qui parlent de la Grande Guerre de la société qui les produit et qui les regarde ? Cet ouvrage est le fruit d'un colloque qui s'est tenu à la Cinémathèque de Toulouse en février 2008 dans le cadre du festival Zoom arrière.

- 14-18 au cinéma : les 50 grands films de la Grande Guerre : Quatre-vingt dix ans après la signature de l'Armistice, que reste-t-il de 14-18, la terrible boucherie (10 millions de morts) dont le XX^e siècle serait sorti tout entier ? Une réflexion sur la construction de l'Histoire, un regain d'intérêt pour la "guerre au quotidien" vécue par les poilus et des films. Des centaines de films, de tous horizons temporels et géographiques.
Dans cet ouvrage, qui se veut avant tout un Guide Pratique, accessible à tous, nous en avons sélectionné cinquante des incontournables bien sûr Charlot soldat (Charles Chaplin, 1918), La Grande Parade (King Vidor, 1925), La Grande Illusion (Jean Renoir, 1937) ou Les Sentiers de la gloire (Stanley Kubrick, 1957) mais aussi des incunables et des raretés, comme les oeuvres du flamboyant Rex Ingram (Les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse, 1921, Mare Nostrum, 1926) ou, plus près de nous, Le Tigre du ciel (Jack Gold, 1976).

A voir aussi, un dossier sur le cinéma de 14-18 sur le site Ecran noir : Toutes les guerres ont eu leur film. Mais quelques unes, les plus récentes, les plus mondiales, les plus atroces, ont eu le droit à une sorte d'anthologie. La Grande Guerre est de ces guerres cinégéniques.